A la veille de la 24ème Conférence des parties-COP24 et dans le contexte actuel d'alertes à un « effondrement » possible, le nouveau numéro d'Infos 21, notre lettre d'information, est consacré à la lutte contre le changement climatique. Découvrez l'édito de Bettina Laville «Fin du monde, fin de mois et réchauffement climatique», et l'interview de Brigitte Collet, Ambassadrice chargée des négociations sur le changement climatique.-----------
En ce mois de décembre 2018, la transition énergétique est au cœur de l'actualité. Et pas seulement parce que la
24ème Conférence des parties se tient du 2 au 14 à Katowice en Pologne.
Quelle que soit l’opinion qu’on porte sur le mouvement des « Gilets jaunes », on se souviendra de cet automne 2018 pour avoir porté sur la scène politique les complexités des arbitrages entre le long terme et le court terme : l’échec, on espère momentané, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ; la contestation de la taxe carbone, instrument indispensable de régulation des émissions ; la revendication de la justice sociale que les manifestants n’appellent pas encore justice climatique. Tout ceci dans un contexte où les alertes à un « effondrement » possible se multiplient. S’il fallait une confirmation, la « transition », que d’aucuns entonnent comme positive et enthousiasmante, comme une exaltante opportunité, ne se fera pas sans douleur. Qui, d’ailleurs, pouvait en douter ?
Pour les alertes, elles sont nombreuses : citons le
nouveau rapport du GIEC sur les « impacts d’un réchauffement climatique global de 1,5 C » en octobre dernier, et, coup sur coup, en novembre, le rapport publié par un collectif de l'Université d'Hawaï dans la revue «
Nature climate change » sur les risques cumulés entraînés par le changement climatique, et le
rapport gouvernemental américain « National climate assessment », mandaté par le Congrès.
La transformation est enfin enclenchée notamment via un taux signifiant de la taxe carbone. Comment en effet être crédible sur la scène européenne, au moment des risques de désengagement, et mondiale, en regard des pays tentés de rompre avec l'Accord de Paris, si on n'est pas soi-même exemplaire, ou tout au moins volontariste ? Pour les arbitrages de la Programmation pluriannuelle de l’Energie - PPE, elles entérinent de solides avancées : une trajectoire en ligne avec l’objectif de 32 % d’énergies renouvelables à l’horizon 2030, la priorité réaffirmée à l’efficacité énergétique, la géothermie, le biogaz. L’arbitrage sur le nucléaire fait grincer des dents, mais il est de bon sens, au vu des enjeux économiques et écologiques. L’annonce d’un grand débat citoyen ne peut que satisfaire le Comité 21, qui va tenir début 2019 son deuxième forum sur la citoyenneté écologique.
Pour la conjugaison des justices sociale et écologique, on n’en est qu’au début. Certes les inondations, les incendies, la fonte des glaciers, entre autres, nous rappellent à la réalité de l'anthropocène, et traduit un nouveau sens des responsabilités collectives. Mais cet anthropocène doit aussi fonder de nouveaux rapports sociaux, et là, on a du chemin à faire. Laissez-moi reprendre les paroles de réaction au discours du Président de la République d’Aurélien Barrau, auteur de l’appel des 200 personnalités en septembre dernier
« il n’est sans doute pas possible de faire face au drame actuel en tentant désespérément de sauvegarder un système mortifère et agonisant. Il faudra aller plus loin. (…) Le seul espoir face à la catastrophe en cours, c’est que, finalement, forcés d’inventer un autre rapport à la nature, du dedans, nous soyons aussi contraints d’inventer un autre rapport à nos semblables. Peut-être la nécessité écologique sera-t-elle finalement le salut social. »
L’espoir, avant la COP24, se trouve du côté des acteurs non-étatiques, il faut mentionner le premier rapport annuel de l' «
Observatoire mondial de l'action climatique non-étatique » de l'association Climate Chance, et bien sûr les expériences concrètes présentées dans ce numéro 192 d'Infos 21 par les adhérents. Mais il faudra aussi s’adapter ; c’est notre conviction. Dans le cadre des priorités de sa feuille de route 2017-2020, le Comité 21 a lancé en septembre dernier, avec le soutien du Ministère des Affaires Etrangères, de l'ADEME, de la CDC, d’EDF, de Veolia, d’Engie, et de Suez, un
programme dédié à l’adaptation aux changements climatiques, arguant que la transformation des activités et des territoires sont des enjeux essentiels en regard des conséquences du changement climatique : recherche scientifique, appui-conseil aux adhérents, rencontres-débats, décryptage des enjeux internationaux... Dans ce cadre, une session de terrain se tient le 19 décembre à l'occasion du 2
ème Colloque national Sciences et Sociétés, co-organisé par les GREC-PACA, CNFCG, GICC, à Marseille sur le thème « Adaptation et territoires ».
Á la veille de la COP24, et pendant la
COP14 de la Convention sur la diversité biologique (Sharm El-Sheikh, en Égypte, 17-29 Novembre 2018), le Comité 21 a réuni dans une rencontre-débat le 5 novembre dernier les deux Ambassadeurs français en charge, Brigitte Collet pour le climat, (qui nous fait le plaisir de répondre à nos « 3 questions…) et Xavier Sticker pour la biodiversité, Car, encore une fois, il ne faudrait pas que l’actualité énergétique occulte le silence des oiseaux…
Alors, rendez-vous pour les conclusions de la COP14, et pour la COP24, où le Brésil sera beaucoup observé, avant que ne le soit, pour la COP25, la nouvelle Commission européenne.
Bettina Laville, présidente du Comité 21
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